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Pour le mois des contes et légendes organisé par Bidib du blog "ma petite médiathèque" nous avons le choix entre 10 pistes.
Pour ce deuxième article, j'ai choisi la piste "d’un conte 3 coups" (présentez un même conte sous 3 formes différentes : 3 albums, 2 albums et 1 film…)"
La Belle et la Bête
C'est un des contes que je connaissais le moins, jusqu'à ce que je vois le film sorti en 2017, qui m'a énormément plu, l'histoire, les couleurs, la musique, tout me plait dans cette version. C'est rare, je n'aime pas les films où le conte est totalement détourné , donnant un film souvent trop sombre dans tous les sens du terme.
Conte d'origine :
Le conte d'origine est attribué à Jeanne-Marie Leprince de Beaumont, bien qu'il y ait des versions antérieures.
Elle nait en 1711, journaliste et écrivain, elle a écrit une soixantaine de recueils de contes dont " le magasin des enfants" d'où "la belle et la bête" est tiré. Elle est considérée comme l'un des premiers auteurs de ce genre. Le conte est paru en 1757.
Résumé : Une jeune femme prénommée Belle se sacrifie pour sauver son père, condamné à mort pour avoir cueilli une rose dans le domaine d'un terrible monstre. Contre toute attente, la Bête épargne Belle et lui permet de vivre dans son château. Elle s'aperçoit que, derrière les traits de l'animal, souffre un homme victime d'un sortilège.
Dans cette première version, Belle a des frères et 2 sœurs particulièrement méchantes et vaniteuses :
"Il y avait une fois un marchand, qui était extrêmement riche. Il avait six enfants, trois garçons et trois filles ; et comme ce marchand était un homme d'esprit, il n'épargna rien pour l'éducation de ses enfants, et leur donna toutes sortes de maîtres. Ses filles étaient très belles ; mais la cadette surtout se faisait admirer, et on ne l'appelait, quand elle était petite, que la belle enfant ce qui donna beaucoup de jalousie à ses sœurs. Cette cadette qui était plus belle que ses sœurs, était aussi meilleure qu'elles; les deux ainés avaient beaucoup d'orgueil parce qu'elles étaient riches."
Du jour au lendemain le père se retrouve ruiné avec comme seule solution de vivre dans une petite chaumière à la campagne, seul bien qu'il lui reste, et travailler, sa famille et lui , comme des paysans. Belle et ses frères travaillent dur tandis que les deux sœurs se laissent vivre.
Un jour, on avertit le père qu'un de ses bateaux arrivaient chargé de marchandises, sûrs de retrouver de l'argent, les sœurs commandent à leur père des robes , des bijoux, du luxe... tandis que Belle demande à son père de lui rapporter une simple rose.
"...Il y avait un an que cette famille vivait dans la solitude, lorsque le marchand reçut une lettre, par laquelle on lui mandait qu'un vaisseau, sur lequel il avait des marchandises, venait d'arriver heureusement. Cette nouvelle pensa tourner la tête à ses deux aînées, qui pensaient qu'à la fin, elles pourraient quitter cette campagne, où elles s'ennuyaient tant ; et quand elles virent leur père prêt à partir, elles le prièrent de leur apporter des robes, des palatines, des coiffures, et toutes sortes de bagatelles. La Belle ne lui demandait rien ; car elle pensait en elle-même, que tout l'argent des marchandises ne suffirait pas pour acheter ce que ses sœurs souhaitaient.
« Tu ne me pries pas de t'acheter quelque chose, lui dit son père.
- Puisque vous avez la bonté de penser à moi, lui dit-elle, je vous prie de m'apporter une rose, car il n'en vient point ici... »
Malheureusement, il n'y a pas de marchandises, et c'est toujours aussi pauvre qu'il doit prendre le chemin du retour. La nuit est tombée, le père se perd dans la forêt :
"...Tout d'un coup, en regardant au bout d'une longue allée d'arbres, il vit une grande lumière, mais qui paraissait bien éloignée. Il marcha de ce côté-là, et vit que cette lumière sortait d'un grand palais, qui était tout illuminé. Le marchand remercia Dieu du secours qu'il lui envoyait, et se hâta d'arriver à ce château ; mais il fut bien surpris de ne trouver personne dans les cours...."
"...il y trouva un bon feu; et une table chargée de viande, où il n'y avait qu'un couvert. Comme la pluie et la neige l'avaient mouillé jusqu'aux os, il s'approcha du feu pour se sécher, et disait en lui-même, le maître de la maison, ou ses domestiques me pardonneront la liberté que j'ai prise, et sans doute ils viendront bientôt. Il attendit pendant un temps considérable ; mais onze heures ayant sonné, sans qu'il vît personne, il ne put résister à la faim, et prit un poulet, qu'il mangea en deux bouchées, et en tremblant. Il but aussi quelques coups de vin, et devenu plus hardi, il sortit de la salle, et traversa plusieurs grands appartements, magnifiquement meublés. A la fin, il trouva une chambre, où il y avait un bon lit, et comme il était minuit passé, et qu'il était las, il prit le parti de fermer la porte, et de se coucher...."
Au petit matin, il repart sans oublier la rose de Belle :
"...Le bonhomme, après avoir pris son chocolat, sortit pour aller chercher son cheval, et comme il passait sous un berceau de roses, il se souvint que la Belle lui en avait demandé, et cueillit une branche, où il y en avait plusieurs. En même temps, il entendit un grand bruit, et vit venir à lui une bête si horrible, qu'il fut tout prêt de s'évanouir..."
"...« Vous êtes bien ingrat, lui dit la Bête, d'une voix terrible ; je vous ai sauvé la vie, en vous recevant dans mon château, et pour ma peine, vous me volez mes roses, que j'aime mieux que toutes choses au monde. Il faut mourir pour réparer cette faute..."
"...je veux bien vous pardonner, à condition qu'une de vos filles vienne volontairement, pour mourir à votre place ; ne me raisonnez pas : partez, et si vos filles refusent de mourir pour vous, jurez que vous reviendrez dans trois mois. »
Le père n'avait pas l'intention de donner une de ses filles au monstre mais souhaitait dire au-revoir à ses enfants :
« ...La Belle, prenez ces roses ; elles coûteront bien cher à votre malheureux père et tout de suite, il raconta à sa famille la funeste aventure qui lui était arrivée. A ce récit, ses deux aînées jetèrent de grands cris, et dirent des injures à la Belle, qui ne pleurait point.
« Voyez ce que produit l'orgueil de cette petite créature, disaient-elles ; que ne demandait-elle des ajustements comme nous ; mais non, mademoiselle voulait se distinguer ; elle va causer la mort de notre père, et elle ne pleure pas.
- Cela serait fort inutile, reprit la Belle ; pourquoi pleurerais-je la mort de mon père ? Il ne périra point. Puisque le monstre veut bien accepter une de ses filles, je veux me livrer à toute sa furie, et je me trouve fort heureuse, puisqu'en mourant, j'aurai la joie de sauver mon père, et de lui prouver ma tendresse..."
Le père accepte d'emmener Belle au château, la 1ère nuit Belle fait un rêve :
".... Pendant son Sommeil, la Belle vit une dame qui lui dit :
« Je suis contente de votre bon coeur, la Belle, la bonne action que vous faites, en donnant votre vie, pour sauver celle de votre père, ne demeurera point sans récompense... »
Bien qu'effrayée au début par l'apparence de la bête, elle réalise que la bête est cultivée, qu'elle aussi aime les livres, et qu'elle a un regard bon et doux, petit à petit elle s'éprend de lui. Mais son père lui manque et grâce à un miroir magique elle voit qu'il se meurt de chagrin d'avoir perdu sa fille chérie...
"...je ne souhaite rien que de revoir mon pauvre père, et de savoir ce qu'il fait à présent » : elle avait dit cela en elle-même. Quelle fut sa surprise ! en jetant les yeux sur un grand miroir, d'y voir sa maison, où son père arrivait avec un visage extrêmement triste. Ses sœurs venaient au-devant de lui, et malgré les grimaces qu'elles faisaient, pour paraître affligées, la joie qu'elles avaient de la perte de leur soeur, paraissait sur leur visage.
La bête l'autorise à aller voir son père mais elle devra être de retour dans une semaine sinon la bête mourra...
"...j'ai tant d'envie de revoir mon père, que je mourrai de douleur, si vous me refusez ce plaisir.
- J'aime mieux mourir moi-même, dit ce monstre, que de vous donner du chagrin. Je vous enverrai chez votre père, vous y resterez, et votre pauvre Bête en mourra de douleur.
- Non, lui dit la Belle, en pleurant, je vous aime trop pour vouloir causer votre mort. Je vous promets de revenir dans huit jours..."
Elle revoit son père, découvre que ses sœurs sont mariés et riches mais malheureuses à cause de leurs maris, lorsqu'elle veut rejoindre la bête, après avoir rassuré son père, ses deux sœurs jalouses, font semblant de pleurer pour qu'elle reste, Belle cède, accepte de rester une semaine de plus mais regrette, lorsqu'elle est de retour au château elle découvre la bête mourante de chagrin :
"...Elle trouva la pauvre Bête étendue sans connaissance, et elle crut qu'elle était morte. Elle se jeta sur son corps, sans avoir horreur de sa figure, et sentant que son coeur battait encore, elle prit de l'eau dans le canal, et lui en jeta sur la tête. La Bête ouvrit les yeux et dit à la Belle :
« Vous avez oublié votre promesse, le chagrin de vous avoir perdue, m'a fait résoudre à me laisser mourir de faim ; mais je meurs content, puisque j'ai le plaisir de vous revoir encore une fois.
- Non, ma chère Bête, vous ne mourrez point, lui dit la Belle, vous vivrez pour devenir mon époux ; dès ce moment je vous donne ma main, et je jure que je ne serai qu'à vous. Hélas, je croyais n'avoir que de l'amitié pour vous, mais la douleur que je sens, me fait voir que je ne pourrais vivre sans vous voir. »
A peine la Belle eut-elle prononcé ces paroles, qu'elle vit le château brillant de lumière, les feux d'artifices, la musique, tout lui annonçait une fête mais toutes ces beautés n'arrêtèrent point sa vue : elle se retourna vers sa chère Bête, dont le danger la faisait frémir. Quelle fut sa surprise ! La Bête avait disparu, et elle ne vit plus à ses pieds qu'un prince plus beau que l'amour, qui la remerciait d'avoir fini son enchantement. Quoique ce prince méritât toute son attention, elle ne put s'empêcher de lui demander où était la Bête..."
Une méchante fée avait ensorcelé le prince qui ne pouvait se délivrer du sort qu'en rencontrant l'amour.
La fée, que Belle avait vu en songe, jeta un sort aux deux vilaines sœurs :
« ...Belle, lui dit cette dame, qui était une grande fée, venez recevoir la récompense de votre bon choix : vous avez préféré la vertu à la beauté et à l'esprit, vous méritez de trouver toutes ces qualités réunies en une même personne. Vous allez devenir une grande reine : j'espère que le trône ne détruira pas vos vertus. Pour vous, mesdemoiselles, dit la fée aux deux sœurs de Belle, je connais votre coeur, et toute la malice qu'il enferme. Devenez deux statues ; mais conservez toute votre raison sous la pierre qui vous enveloppera. Vous demeurerez à la porte du palais de votre soeur, et je ne vous impose point d'autre peine, que d'être témoins de son bonheur. Vous ne pourrez revenir dans votre premier état, qu'au moment où vous reconnaîtrez vos fautes ; mais j'ai bien peur que vous ne restiez toujours statues. On se corrige de l'orgueil, de la colère, de la gourmandise et de la paresse : mais c'est une espèce de miracle que la conversion d'un coeur méchant et envieux. »
Dans le moment la fée donna un coup de baguette, qui transporta tous ceux qui étaient dans cette salle, dans le royaume du prince. Ses sujets le virent avec joie, et il épousa la Belle, qui vécut avec lui fort longtemps, et dans un bonheur parfait, parce qu'il était fondé sur la vertu."
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La belle et la bête,
film de Jean Cocteau, 1946, avec Jean Marais et Josette Day
Le film a reçu le Prix Louis-Delluc récompensant le meilleur film français de l’année.
Jean Cocteau est fidèle au conte de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont , le rôle des sœurs est important aussi dans cette version. La plus grande différence est l'existence d'un homme amoureux de Belle, ami d'un de ses frères.
J'ai aimé aussi cette version, le film, qui a 70 ans, ne m'a pas semblé si "vieillot" que ça, les effets spéciaux sont beaux, les chandeliers sont animés, le miroir est magique, les lumières malgré le noir et blanc donnent de la féerie au film. La scène finale où le couple "s'envole" vers le bonheur est pleine de poésie également.
A noter que l'amoureux de Belle et le prince sont joués par Jean Marais : lorsque le sort est rompu, l'amoureux meurt en prenant le corps de la bête, tandis que le prince prend son apparence , c'est un peu tiré par les cheveux, on ne sait pas trop pourquoi. On ne sait pas non plus pourquoi le prince avait subi ce sort, à part cette explication :
"...Où est la Bête ?
- La Bête n'est plus. C'était moi. Mes parents ne croyaient pas aux fées. Elles les ont punis en ma personne. Je ne pouvais être sauvé que par un regard d'amour.
- De pareils prodiges sont-ils possibles ?
- Nous en sommes la preuve. L'amour peut faire qu'un homme devienne bête. L'amour peut faire aussi qu'un homme laid devienne beau."
bande son du film :
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La belle et la bête
2017, réalisé par Bill Clanton, avec Emma Watson et Dan stevens
productions Walt Disney
Fin du XVIIIè siècle, dans un petit village français. Belle, jeune fille rêveuse et passionnée de littérature, vit avec son père, un vieil inventeur farfelu. S'étant perdu une nuit dans la forêt, ce dernier se réfugie au château de la Bête, qui le jette au cachot. Ne pouvant supporter de voir son père emprisonné, Belle accepte alors de prendre sa place, ignorant que sous le masque du monstre se cache un Prince Charmant tremblant d'amour pour elle, mais victime d'une terrible malédiction.
Belle n'a ni frère , ni sœur qui ont pourtant un rôle important dans les deux versions précédentes, ne serait-ce que pour accentuer la morale de l'histoire : le paraître, le luxe ne rendent pas heureux, la beauté du cœur, oui.
Alors que dans le conte et la version de Cocteau, Belle se sacrifie pour sauver son père, ici, c'est en le cherchant dans la forêt qu'elle le trouve, par hasard.
Belle a aussi un prétendant, plus bête et méchant que dans la version Cocteau, personnage absent dans le conte d'origine.
On sait dès le début du film, grâce au prologue, qui est la bête et pourquoi elle a cette apparence :
Il était une fois, dans le coeur secret de la France, un séduisant jeune prince qui vivait dans un merveilleux château. Bien qu’il eût tout ce que désirait son coeur, le Prince était égoïste et acariâtre. Il taxait le village pour amasser les objets les plus exceptionnels dans son château. Un soir d’hiver, une vieille mendiante se présenta au château et lui offrit une rose en échange d’un abri contre le froid qui faisait rage. Saisi de répulsion devant sa misérable apparence, le prince ricana de son modeste présent et chassa la vieille femme. Elle tenta de lui faire entendre qu’il ne fallait jamais se fier aux apparences, et que la vraie beauté venait du cœur. Lorsqu’il la repoussa pour la seconde fois, la hideuse apparition se métamorphosa sous ses yeux en une créature enchanteresse. Le prince essaya de se faire pardonner, mais il était trop tard car elle avait compris la sécheresse de ce cœur déserté par l’amour. En punition, elle le transforma en une bête monstrueuse et jeta un sort sur le château ainsi que sur tous ses occupants. Horrifiée par son aspect effroyable, la Bête se terra au fond de son château, avec pour seule fenêtre sur le monde extérieur un miroir magique. La rose qui lui avait été offerte était une rose enchantée qui ne se flétrirait qu’au jour de son vingt-et-unième anniversaire. Avant la chute du dernier pétale de la fleur magique, le prince devrait aimer une femme et s’en faire aimer en retour pour briser le charme. Dans le cas contraire, il se verrait condamné à garder l’apparence d’un monstre pour l’éternité. Plus les années passaient et plus le prince perdait tout espoir d’échapper à cette malédiction ; car en réalité, qui pourrait un jour aimer une bête ? »La rose a un triple rôle : Elle est la cause du sortilège et aussi de la colère de la bête lorsque le père en cueille une, mais cette rose est aussi la seule chance pour la bête de trouver l'amour et de reprendre apparence humaine, tout ça avant que le dernier pétale ne tombe...
Pour écouter toutes les musiques du film : bande originale française du film
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Je crois qu'on ne peut pas comparer réellement les trois versions, chacun a raconté la même histoire, avec les mots, les images, le son de son époque. Ma préférence va clairement vers la version Disney, j'ai aimé savoir dès le début le pourquoi du sort, j'ai aimé la présence et l'humour des personnes/objets ensorcelés, mme Samovar et son fils Zip particulièrement.
J'ai aimé les couleurs du film, la dose juste comme il faut de magie, la place importante des chansons et de la musique, je trouve que c'est un beau film.
Mais la version de Cocteau que je ne connaissais pas, me plait aussi, la façon de tourner et les lumières donnent la poésie et la magie au film.